(2011-2012) La dépendance au mental: 

 

Tout chercheur de vérité se heurte à un moment ou un autre à cette question: "comment se fait-il que malgré tout le chemin parcouru, les pensées reviennent toujours à l'assaut, s'infiltrant par les plus petits interstices?"

 

A partir de mon observation j'ai identifié deux causes possibles.

Le mental fonctionne à partir de la mémoire des  expériences passées.  Il se saisit de chaque nouvelle expérience, la confronte à cette mémoire et la répertorie sur un mode duel: l'expérience est alors cataloguée en correcte ou pas correcte.

A partir de ce classement, il y a deux formes de dépendances fortes qui peuvent se créer.

1-Quand le classement est "expérience correcte, j'aime", l'interprétation déclenche un besoin compulsif de la revivre sans cesse: l'expérience est à garder.  Il n'y a de cesse de chercher à la maintenir et à la reproduire puisqu'elle est jugée bonne pour soi par le mental. Il s'ensuit, alors, attachement et dépendance.

2-Quand le classement est "expérience incorrecte, je n'aime pas", les stratégies de protection sont aussitôt mises en place et génèrent l'anesthésie des sens afin de ne plus avoir à vivre les sensations procurées par l'expérience. La conséquence de l'anesthésie est que les sensations globales diminuent car même si le processus d'anesthésie est ciblé, il est assez grossier. La répétition de ces stratégies finit par nous couper de nos sensations naturelles. Le sentiment est alors de se sentir moins vivant. 

Pour pallier à cela, il se  crée  de nouvelles sensations à partir de l'interprétation mentale de l'expérience et non plus directement de celle-ci. Ces sensations sont plus fortes, plus "criantes" qu'au naturel afin de pouvoir les percevoir au-delà de l'anesthésie. Je les nomme hypersensations. Ce sont elles qui redonnent l'impression de se sentir vivant alors que l'on s'est coupé de la sensorialité d'origine. Dès lors, un nouvel attachement apparaît à cette "hypersensorialité" qui devient synonyme de vie.

 

Lorsque les constructions mentales sont vues pour ce qu'elles sont, cette "hypersensorialité tombe d'elle- même et laisse au mental affaibli, mais encore aux commandes, une impression de non vie très déstabilisante. Il en est de même, lorsque l'on s'aperçoit que ce qui était jugé bon pour soi par le mental est aussi illusoire que le jugement inverse. Renoncer à ce qui était recette de bonheur laisse, un moment, un vide inquiétant pour ce même mental.

Pourtant il n'y a pas de compromis possible pour rétablir le maître de céans à son poste et laisser le mental redevenir le merveilleux serviteur de celui-ci. Le rêve doit être vu dans sa globalité. Tant qu'une part du rêve existe, le fonctionnement reste duel. Un pôle attirera toujours l'autre. C'est une question d'équilibre. Le + ne peut fonctionner sans le -. La réalité les réunit, le rêve les sépare mais les crée simultanément.

"Traiter" ce qui est jugé souffrant, pas de problème, mais "traiter" ce qui est jugé  bon pour soi est une cause possible de la persistance  de l'addiction au mental.

 

Comment s'en départir?

 

La réalité se situe dans aucune interprétation mais dans le fait de ce qui est.

 

--Suggestion d'un petit exercice qui aide à retrouver la voie de la réalité :

1-prenez un évènement désagréable qui vous est arrivé et racontez le (pas plus de 2mn)

2-prenez le temps puis racontez cet évènement avec une nouvelle version, totalement positive (la précédente a probablement été racontée de façon négative puisque la consigne de départ était de raconter un évènement désagréable)

3-prenez à nouveau le temps, puis racontez ce même évènement épuré de toute connotation négative et positive. Il reste les faits, c'est la réalité retrouvée.--

 

NB: "The Work", mis au point par Byron Katie est un processus méditatif merveilleux qui oeuvre dans ce sens. Je ne saurais trop vous le conseiller.

 

Lorsque la réalité épurée des interprétations mentales refait surface, même si le mental résiduel est déstabilisé et inquiet, il se développe en parallèle une sensation de profondeur sans fond, de quiétude infinie qui dissout progressivement toutes ces scories du passé mental. Cette dégustation de détente et paix si profonde permet d'accepter ce moment de perte de repères. Il s'ensuit la restauration de la sensorialité d'origine, naturelle, fine, subtile et en même temps intense, profonde et vaste, qui permet de retrouver la vérité du vivant: le vécu direct.

 

 Il ne s'agit pas de se battre pour y arriver, ni de s'efforcer à lâcher quoi que ce soit.

 Cela se réalise tout naturellement à partir de l'observation de soi. L'observation de soi nous apprend tout à notre sujet: notre façon de fonctionner, d'être et tout du monde de rêverie qui nous fait vivre tant d'aberrations. C'est cette observation qui, par la mise en lumière progressive de tout cela, le rectifie progressivement. En effet dès qu'une illusion est vue, elle ne peut plus exister. C'est elle, encore,  qui amène le lâcher prise et permet la restitution à l'Intelligence de la vie des commandes de notre fonctionnement. Dès lors, le cheminement naturel de ce que l'on est peut s'exprimer, nous apportant détente, joie, amour, plénitude et retrouvailles de tout ce que nous sommes réellement.

 

 

Ainsi,

 En arrière-plan de tout ce qui est, il y a la charpente, l'essence qui le supporte, le nourrit  et lui permet d'exister:

                                                         Le Silence,  l'Océan de quiétude.

 

 

Cela est et a toujours été. Cela ne peut pas nous quitter. Simplement, lorsque nous regardons les croyances du mental, cela parait occulté comme par un grand rideau de rêves. S'il est plus aisé de quitter les illusions mentales jugées "mauvaises pour soi", le lâcher prise des croyances "bonnes pour soi" l'est moins. Mais ce n'est qu'à ce prix que la vérité du réel et donc la libération de l'imaginaire souffrant pourra se faire. Cela arrive en temps et heures voulues.